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les cendres d'A
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23 décembre 2010

renaissance

Renaissance

 

Journal

Le 10 octobre 2010

C’est pour ça. Je comprends tout maintenant, il suffit parfois d’un mot, d’un souffle, d’une parole lâchée, d’une pensée à peine formulée. Je comprends tout, et en même temps je ne comprends pas pourquoi tout a mis tant de temps à se mettre en place. Pourquoi il m’a fallu me cacher derrière ce rideau spectaculaire de non-sens, à me boucher les yeux comme avec de la ouate blanche sous les paupières.

Curieux que cette révélation me vienne seulement maintenant, à quelques jours de mes trente-trois ans. Voilà pourquoi j’ai décidé d’écrire tout cela, de graver cela avec des dates, pour comprendre… comprendre quoi, d’ailleurs ? rien que d’y penser cela me donne la nausée. L’impression désagréable qu’un couvercle de nuages se déverse sur moi.

 

J’aurais pourtant dû m’en douter avant. Et là malgré l’évidence Je doute encore. Tout ce passé n’est-il pas intrinsèquement tout ce qui me constitue ? Voyons voir. Je suis née le 12 octobre 1976, pendant l’heure de la sieste, et j’avais passé neuf mois dans la chaleur du corps de ma mère, dans les semaines les plus chaudes de cette année caniculaire. Je suis née au milieu d’une famille de cinq enfants, qui se ressemblaient beaucoup. J’ai grandi dans cette douce discontinuité de bruits et de cris, poussés par cette horde d’enfants proches en âge, un tous les deux ans comme des métronomes. Mon grand frère, m’avait-on dit, le premier avant les autres, est mort-né. Les autres ont grandi en sagesse sans trop faire de bêtises. J’étais la seule fille parmi quatre garçons, autant vous dire à quel point ma mère me bichonnait. J’étais forcément la plus belle, la plus intelligente, la plus douce des petites filles qu’on eût pu imaginer.

Malgré mes qualités évidentes, j’ai grandi comme une plante au milieu de jeunes chênes promis à un avenir glorieux. J’étais la sœur qui regardait ses frères jouer aux playmobiles, et boudait un peu les poupées trop roses et trop niaises pour mes goûts pervertis par tous ces gars qui m’entouraient. L’été, je les regardais dans mes poses de fille en petite robe fleurie escalader les arbres, faire cramer des grenouilles, user leurs genoux calleux sur les graviers des chemins, et l’hiver, malgré mon envie de faire plutôt un joli bonhomme de neige avec une belle écharpe et des boutons à la place des yeux, accompagné de sa femme, en pylône, avec des petits seins bien ronds et des bracelets, et une horde d’enfants rondouillards, je me laissais attaquer en pleurant discrètement par des averses de boules de neige, qui venaient s’écraser aux endroits vulnérables, entre l’écharpe et le bonnet, là où la peau transparente crie sous la morsure du froid.

J’ai commencé à préférer, à ces atroces luttes de pouvoir où mes frères ricanaient entre eux sans se soucier de mes délicatesses, aller m’isoler dans ma petite chambre, où je regardais pensivement le plafond, sans rien faire. Je suis restée ainsi un nombre de fois incalculable, allongée, les yeux dans le vague, déroulant mes pensées dans un temps qui ne fait que passer sans rien construire. Ma pensée ne fabriquait rien, je restais ainsi en me disant que ce temps vu et senti à ne rien en faire était la plus délicieuse des perversions.

J’ai grandi dans cette attitude de déni de tout, sans vraiment avoir de place, sans la rechercher non plus. A l’école, dès le départ, j’étais l’élève dont on ne se souvient pas, l’élève qui a de bons résultats, et ne parle jamais. Je comprenais tout très facilement, sans effort et sans enthousiasme, j’apprenais sans apprendre, je faisais, en somme, ce qu’il fallait faire pour correspondre à ce que pensait ma mère de moi, la plus belle, la plus sage, la plus intelligente des petites filles.

A l’adolescence, j’ai continué sur la même lignée tranquille de petites rencontres, je faisais partie de petits groupes de filles classiques qui manifestaient leur rébellion en réclamant des jeans à la place de leurs jupes écossaises. Je fréquentais de loin les autres plus aguerries, qui sortaient avec des garçons et expliquaient comme on suçait sans l’avoir jamais fait.

Cette période me laisse un goût amer dans la bouche. Je vivais comme une ombre et je ne faisais que suivre, sans aimer, ni craindre, dans le désir toujours plus grand de me fondre dans la masse. Et je me fondais tellement bien que personne ne me haïssait ni ne m’aimait.

Je continuais cependant avec régularité mon occupation favorite, regarder sans rien sentir et rien construire ce plafond stagnant qui me mangeait mes heures. Du reste, je lisais beaucoup, et je m’étais dit que ma mère aimerait sans doute une fille littéraire, alors j’ai choisi de continuer, par soif de solitude, cette vie par procuration. Je n’avais pas une vie bien remplie, c’est certain, mais ceux des livres avaient eux tout fait, tout vécu, tout pensé, en un sens, cela me rassurait et m’encourageait dans mon absence de volonté de rien…

A ressasser tout cela, je vois bien ce qui se profile petit à petit et que je n’ai jamais osé regarder en face. Ma vie était insipide, c’est certain. Mais je plaisais encore à ma mère, alors je ne me posais pas beaucoup de questions. Comment aurais-je pu, d’ailleurs, me poser cette question, qui me taraude depuis hier soir ? J’étais bien trop occupée à me regarder grandir dans l’indifférence générale, et à ressentir un certain plaisir malsain à me voir au milieu des autres aussi peu colorée, aussi peu contrastée, parce qu’au fond de moi, et ma mère aussi le savait bien, j’avais l’immense plaisir de savoir que j’étais ce que j’étais, et cette conscience formidable me constituait dans un prisme infini et étincelant. Dans ma chambre, sous ce plafond lancinant, je mangeais les heures avec mon néant terrible qui me reconnaissait si bien.

Puis j’ai rencontré Sarah, en rentrant à l’université, en lettres classiques. Une belle fille qui me ressemblait beaucoup, avec un petit quelque chose en plus cependant, une étincelle de vie que je n’avais pas. Je suis devenue son ombre, j’ai pu admirer le pouvoir qu’elle avait sur les hommes. J’ai adoré ces années d’université, où je récoltais en n’étant qu’un nom sur une copie des notes suffisantes pour passer en classe supérieure. Mon amie, qui me prenait avec elle partout, et me traînait comme une gentille fée dans ses cercles d’amis, commença à écrire de la poésie, alors j’en écrivais aussi. J’avais des deuxièmes prix, et elle remportait l’excellence, les regards désireux des hommes, les sourires admiratifs. Moi, je n’avais rien de tout cela, mais j’avais encore mes moments de gloire, face à mon plafond, entre moi et mon néant, et toujours après elle la deuxième place, qui rendait ma mère fière et satisfaite.

Sarah rencontra un homme et disparut de ma vie, me laissant sur la dédicace de son premier recueil de nouvelles un hommage discret : « à celle qui a toujours suivi les affres de ma création ». Mariée, elle perdit mon numéro de téléphone, et je n’en ressentis au final, après des années de complicité et de douce camaraderie, qu’un petit pincement au cœur, parce que, avec ma mère, c’était ma seule véritable amie.

Depuis Sarah, j’ai poussé encore plus dans l’ombre des autres, ma mère m’appelait sa petite sauvage. Elle m’a fait rencontrer un charmant garçon, ami de mon frère aîné, dont je suis tombée éperdument amoureuse, mais qui ne m’a pas vraiment regardée alors que je le dévorais des yeux, à la dérobée. Peu importe, j’aimais ! Mon plafond avait maintenant un visage, celui de ce prince brun aux yeux noirs comme de la braise, avec des longs cils de fille et une bouche charnue que j’avais envie de mordre. Ce prince noir finit par me voir, par hasard, parce que le destin s’en était mêlé, et qu’il faut bien parfois avoir de la chance dans la vie. Nous nous sommes découverts, et il semble qu’il m’ait aimé, pendant un certain temps. Et puis, je ne sais pas pourquoi, il m’a paru bien moins beau qu’au début. Il m’aimait. Comment pouvait-on m’aimer ? j’ai trouvé ça suspect, je suis partie, il s’en est remis je crois, en tout cas il n’a rien fait pour me récupérer. Il est marié maintenant, c’est dans l’ordre des choses, et moi je suis restée célibataire, avec mon plafond gluant qui me bouche les heures. J’ai trouvé un boulot dans une bibliothèque, après avoir eu un concours et une connaissance qui m’a trouvé un poste. Je range des livres, je passe entre les rayons et je ramasse parfois un livre tombé par terre que je feuillette pendant des jours entiers, sans que personne ne vienne me demander des comptes.

C’était ma vie depuis que j’avais tourné le dos à l’amour, qui m’aurait apporté sans doute son lot de petites joies, avec les enfants, les disputes, les vaisselles et les inscriptions en tous genres. C’est ce que j’entendais parfois quand j’allais lire en bas de chez moi, dans un petit café où des femmes au foyer racontent leur journée à venir, pendant que j’oubliais un peu que je n’en avais pas. C’était ma vie, qui se déroulait sans autre but que de trouver quelques moments, de plus en plus fréquents, comme une drogue, où je pouvais m’extraire de tout et où je pouvais me consacrer à mon vice, allongée sur mon lit, et voir par exemple l’obscurité envahir peu à peu le plafond gris.

Mais quelque chose est arrivé qui a bouleversé cette tranquille et douce tristesse qui composait l’atmosphère de mon existence. Quelque chose qui a paru à mes yeux et qui a à jamais, si je peux encore m’exprimer ainsi, rendu tout cela atroce, effroyable, révoltant. L’angoisse s’est emparé de moi, et maintenant quand je m’allonge dans mon lit face à mon plafond, ma gorge se noue, mes mains se crispent sur la couverture, et c’est à peine si j’arrive à respirer, et toutes ces sensations diffuses en plus sont persécutées par l’innommable qui s’empare de mon esprit abusé. J’arrive à la fin.

J’avoue que je ne respirais pas la joie de vivre. Mes journées se passaient sans encombre, sans heurt, sans rencontre, et je passais beaucoup de temps à m’interroger sur cette vie que j’avais laissé faire ce qu’elle voulait. Je ne me révoltais pas, cependant, parce que c’est moi qui avais fait cette œuvre médiocre, mais des questions qui ressemblaient à des inquiétudes me traversaient l’esprit, comme des rats sortent de leur trou quand le navire est en train de couler. Quand je marchais dans la rue, je voyais tout défiler autour de moi avec crainte. On me bousculait, et je me sentais coupable d’avoir occupé le passage d’une autre personne. Tout ce qui m’entourait avait une telle présence, une telle force ! comment aurais-je pu lutter… cette femme, haute perchée sur des talons, avait des lèvres rouges et sensuelles, et quand elle riait en passant devant moi, je sentais derrière moi les regards des hommes qui la suivaient. Cet homme criait dans son téléphone en allumant une cigarette, et son épaule frôlait la mienne sans s’en apercevoir, me faisant trébucher. J’étais comme sur une autoroute, avec des tas de voitures qui viennent sur moi en sens inverse et je dois les éviter. Je ne sais plus quel philosophe a pensé que tout le décor qui nous entourait n’avait d’existence que parce qu’on lui en donnait une, par notre conscience. Quelque chose me poussait à penser le contraire… Tout n’était-il pas plus vivant que moi ? A la boulangerie, j’avais beau crier « une baguette s’il vous plaît », on me demandait « pardon ? », ou on me donnait un pain complet.

J’avais commencé par être résignée, mais les années passant, j’avais trouvé cela très étrange. Mes sorties devenaient de plus en plus inquiétantes, et j’hésitais même à appeler le seul lien qui me restât avec l’extérieur, ma mère, mes frères étant depuis quelques années occupés avec leurs familles respectives, qui d’ailleurs enveloppaient ma mère elle-même et la faisaient dériver loin de moi. Je n’avais plus rien du tout. Un fossé terrible me séparait des autres. Et puis l’impossible est apparu.

Il était six heures du soir, et je comptais docilement les minutes qui me séparaient de la fin de ma journée de garde à la bibliothèque. Je vis entrer une jeune femme brune, une grande, qui me rappela vaguement quelqu’un. C’était Sarah, j’en eus tout de suite l’intuition. En vieillissant, elle avait toujours un petit air de famille avec moi qui aurait pu nous faire passer pour des sœurs comme lorsque nous avions vingt ans, et je découvris les mêmes petits affaissements de la physionomie dans ses traits qui étaient devenus aussi rayonnants que les miens étaient devenus ternes. Hésitant une seconde, je ne pus m’empêcher d’aller au devant d’elle, et timidement je lui adressai un sourire, excitée de cette rencontre qui allait illuminer ma journée. En m’approchant d’elle, je vis avec quel soin elle était maquillée, et coiffée, et je découvris avec ravissement l’élégance de sa tenue. Me plantant devant elle, je lui demandai en souriant avec un air entendu : « je peux vous renseigner madame ? ». Elle leva la tête du livre qu’elle était en train de parcourir avec attention, et regarda autour d’elle sans me considérer, puis elle reprit tout bonnement sa lecture. Je réitérais en tremblant ma demande « Je peux vous renseigner… ». Ma voix restait coincée dans ma gorge, et je sentis une curieuse sensation me parcourir des pieds à ma tête. Sarah était là, devant moi, je lui parlais, et elle semblait ne pas me voir ! Elle ne me voyait pas !

Indécise, troublée jusqu’aux larmes, je fis demi-tour et retournai à mon bureau, ne la quittant pas des yeux, épiant si elle jetait un œil dans ma direction, mais elle ne fit rien dans ce sens, et au bout de quelques temps, elle quitta la bibliothèque, et quand elle passa devant moi, honteuse de ma faiblesse je baissai néanmoins les yeux, au lieu de lui crier que j’étais là, et qu’il n’y a pas si longtemps nous nous étions offert, pour fêter notre entrée en maîtrise de lettres, le même porte-documents en cuir…

Une tristesse infinie s’empara de moi, et puis tout de suite après une question effroyable me traversa l’esprit. Derrière le bureau de la bibliothèque déserte, je regardais stupidement le plan de travail blanc sur lequel était posé l’ordinateur où j’organisais depuis des années des données sur les livres. Cette surface blanche, je la connaissais bien, je posais mes coudes tous les jours dessus, et la plupart du temps il était encombré de livres gluants que je n’aimais pas toucher, parce que d’autres, des lecteurs potentiels, aux doigts sales, les avaient palpés, traînés avec eux dans le métro ou dans leur lit, et qu’ils me les rendaient tout dénaturés par cet entourage hostile. Je pouvais détailler le moindre des défauts de cette surface apparemment lisse en contreplaqué, où sur les bords on devinait à quelques endroits où la peinture s’était détachée, le brun du bois aggloméré. Ici, il y avait une trace laissée par un stylo, là, une petite griffure faite par la pointe d’une pochette de cd. Et sur cette surface familière, j’observai avec un regard neuf ma main posée, un peu crispée par la douloureuse aventure que je venais de vivre. J’observais cette main dont je ne pouvais détacher les yeux. Cette main veineuse et blanche. J’observais ma main et au bout d’un long moment de stupide contemplation, je vis ma main disparaître devant mes yeux révulsés ! Puis elle réapparut. Mais pendant l’espace d’une demi-seconde où mon cœur s’était serré je n’avais plus vu ma main… Tout à ma muette réflexion, je n’avais pas remarqué l’heure de la fin de mon travail. Mes collègues commençaient à ranger leurs affaires et fébrilement je pris les miennes, craignant de lancer mon habituel au revoir timide et jamais remarqué par les autres. Etait-ce possible ? Dans la rue on me bousculait, comme d’habitude, et cela me parut saisissant de sens.

Je rentrai dans mon appartement où tout me parut stupidement à sa place, dans un ordre sans harmonie qui n’avait aucun caractère. Je plongeais sur mon lit refait depuis le matin, et commençai ma conversation habituelle avec le plafond sournois qui ne parlait jamais. L’angoisse me saisit d’un coup, je ne devais pas cette fois rester ainsi à écouter le silence des heures vides. Pourquoi n’avais-je rien dit à Sarah ? Pourquoi avais-je à mon tour refusé de me manifester ? qu’est-ce qui me poussait à chaque fois à me résoudre à ces signes de furieuse insignifiance ? Je jonglais jusqu’à la nausée sur ces mots que je connaissais bien et qui étaient le credo de ma religion personnelle. Résignation, insignifiance, vide, vacuité, insipidité, silence. N’étaient –ce que des mots ou les conditions d’une vie improbable et absurde ? Et absurde, était-ce vraiment le mot qui convenait pour caractériser cet état de ma vie ? Je me levai, mes bras et mes jambes étaient aussi légers que l’air qu’ils brassaient. Je me plantai avec terreur devant le miroir de ma salle de bain, éclairé d’un néon blafard qui aplatissait le relief de mon visage vitreux. Je regardais cette face morne que je croyais reconnaître. C’était moi ? Oui, c’était moi. Qu’est-ce qui était moi au fond ? Au fond… selon quelle réalité, au fond ? Mon visage se troublait dans l’intensité douloureuse de mon regard perçant. Je perçais la surface brillante de la glace, et mes yeux, ma bouche, le contour familier de mon visage se troubla soudain au-delà de toute vraisemblance. Je frémissais sans sentir de frémissement. Je rougissais, je voulais ouvrir la bouche et ma bouche restait sans mouvement. Je cherchais, je ne trouvais rien. Mon visage s’était fondu dans le néant de mes yeux clos. Le noir avait tout envahi. Je rugissais, je trépignais, mais l’inconcevable se dressa devant moi avec toute son horrible absurdité, et je ne pouvais que penser, parce que les mots disparaissaient de mon cerveau en bouillie, cette pensée immonde, cette pensée abjecte, cette pensée qui n’était plus rien qu’une sombre plaisanterie…

 Je n’existais pas ! Je n’avais jamais existé. Je n’existerais jamais…

Il n’y a pas à tortiller. Je suis restée sur cette idée depuis hier soir. J’ai marché toute la journée au lieu d’aller travailler, et je n’ai prévenu personne de mon absence. A quoi bon puisque je n’existe pas ? Je n’ai jamais existé. Je ne suis que le fruit de l’imagination de ma mère frustrée de ne pas avoir eu de fille, et le reste, on l’a inventé. Je ne suis rien. Ces quelques lignes tracées ne sont rien. Sarah ne m’a jamais reconnue, sans doute qu’elle avait besoin de ce double imaginaire. Je vais acheter du pain et je mange au bord de la Seine mon pain sans goût qui croustille sous ma langue sans épaisseur. Je vomirai ce pain dans mon lit vide et triste, et le plafond s’effondrera sur moi, ce soir, demain, dans dix ans, qu’importe ? La sublime et horrible chute a commencé. Qu’importent les heures et les jours quand on n’est rien, et que l’abîme, rugissant, s’ouvre sous nos pieds en ricanant ?

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Commentaires
A
Mouais… plaintif et coincé dans la fiction du moi… C’est quelque chose, de découvrir qu’on n'est rien. De l’être à l’avoir, il eût fallu un phallus, ce petit bout de langue, écrite…
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